Voici le début d'une petite histoire,
écrite il y a quelques semaines et corrigée ce matin (merci Anne-Laure
pour tes conseils). Cette idée me vient de ma collaboration avec
Teaspoon sur le projet Tandem Jeunesse. Dans le cadre de notre travail,
elle a fait une illustration de licorne que j'aime beaucoup : elle a
dessiné une "licorne" avec un pansement sur le front (ici).
Pour ce texte, je n'ai pas repris l'idée du pansement car elle
appartient à Teaspoon et que ce texte, même s'il est inspiré d'une
phrase de mon texte Tandem Jeunesse, est à part et ne fait partie du
projet original.
Voici aujourd'hui, le premier chapitre et si vous aimez, je vous ferais lire la suite dans quelques jours. N'hésitez pas à me donner des conseils, à faire des critique, à me suggérer des corrections !
I l
était une fois, dans un pays très lointain, une petite licorne
blanche comme neige que ses parents avaient appelé Li. Elle vivait
au milieu du peuple licorne, dans un univers vallonné, couvert de la
plus douce des herbes. Toutes les petites licornes passaient leur
journée à courir dans la prairie, à se cacher derrière les arbres
de la Forêt Enchantée et à manger les baies sucrées des buissons
épineux. Souvent le soir, Li rentrait chez elle le museau tout
violet, et ses parents, loin de se mettre en colère, se moquaient gentiment d'elle et l'emmenaient se débarbouiller au Lac aux
Merveilles. Là, les licornes se doraient aux rayons de la lune, tout
comme le font les chats au soleil. Une fois repues, elles
retournaient à l'abri des arbres de la Forêt Enchantée et
s'endormaient paisiblement.
Un
jour, Li rentra de bonne heure, ce qui étonna ses parents. Li
n'était jamais la dernière à participer aux activités des autres
licornes et il fallait sans cesse lui rappeler de rentrer avant la
nuit. Or le soleil était encore haut dans le ciel lorsqu'elle
rentra. La tête basse, sans même dire bonjour à ses parents, elle
s'allongea dans son bosquet préféré. Elle ne répondit pas à
l'appel de ses parents et ne les accompagna pas au Lac aux
Merveilles. Elle resta seule, à sangloter en silence. Quand ses
parents rentrèrent, ils la trouvèrent endormie, des larmes encore
accrochées à ses longs cils. De plus en plus inquiets, ses parents
passèrent une nuit blanche à s'interroger sur la tristesse de leur
enfant.
Le
lendemain matin, alors qu'auparavant elle était toujours la première
debout, Li resta allongée dans son bosquet, la mine toujours triste.
Ses parents entreprirent alors de la faire parler et après une
longue matinée muette, Li éclata en sanglots :
- Les
autres se moquent de moi . Ils ne veulent pas de moi dans leurs
jeux.
- Pourquoi
? lui demanda son père. Que s'est-il passé ?
- Ils
disent que je ne suis pas comme eux, que je suis différente et que
je n'ai rien à faire avec eux.
- Pourquoi
? lui demanda sa mère. En quoi es-tu différente des autres ?
Li
baissa les yeux et répondit, dans un reniflement :
- Ma
corne ne pousse pas !
Ses
parents, stupéfaits, restèrent sans voix puis, sachant qu'ils ne
devaient pas laisser leur fille sans réponse, lui dirent :
- Tu
es jeune encore ! Tu as tout le temps pour que ta corne pousse ! - Mais je veux qu'elle pousse maintenant ! cria Li. Je ne veux pas attendre. Je ne veux pas être différente des autres. La corne d'Unicorne a déjà percé sa peau, celle de Pelicorne la fait souffrir et celle de Bricorne fait au moins un centimètre. Moi, je ne sens rien. Regardez, mon front n'est même pas bombé.
- Sois patiente, lui dit sa mère. Ta corne arrivera bien assez tôt.
Li
détourna la tête, la conversation était terminée. Ses parents
eurent beau l'inciter à rejoindre ses amis, lui proposant même de
l'accompagner pour leur parler, Li refusa. Ils la laissèrent donc
seule, espérant que leurs conseils porteraient leurs fruits.
Li,
perdue dans ses pensées, marchait dans la Forêt Enchantée. Une
idée lui tournait dans la tête. Une phrase qu'avait prononcée sa
mère : "ta corne arrivera bien assez tôt". Si sa corne
n'était pas encore arrivée, c'est qu'elle devait être perdue
quelque part. Elle ne pouvait donc pas arriver jusqu'à elle.
Li
prit alors une grande décision ; elle allait partir à la recherche
de sa corne et elle la trouverait. Il était hors de question qu'elle
soit différente des autres. Si sa corne n'était pas arrivée,
c'était probablement parce que le livreur s'était perdu. Li le
trouverait et il lui donnerait enfin sa corne.
Li
partit donc à la recherche de sa corne, sans prévenir personne, peu
soucieuse de les savoir inquiets. Elle n'avait qu'une idée en tête
et rien ne la ferait changer d'avis.
Elle
fit débord un détour par le Lac aux Merveilles où elle découvrit
ses amis en train de jouer et de patauger dans l'eau. Elle remarqua
que le soleil faisait briller leurs petites cornes. Serrant les
dents, elle tourna les sabots et s'enfonça dans la Forêt
Merveilleuse.
Ne
s'étant jamais aventurée très loin, Li était un peu inquiète.
Elle avait beau savoir que la forêt n'était pas dangereuse et qu'on
pouvait y croiser des princes et des princesse, elle était sur ses
gardes, se rappelant des histoires d'ogres et de sorcières qui
circulaient au sein de son groupe d'amis.
Li
marcha longtemps à travers les fleurs chantantes et les arbres
souriants. Alors qu'elle en arrivait à se demander si cette forêt
abritait d'autres créatures que les licornes, elle se retrouva nez à
nez avec un rhinocéros. D'abord étonnée, Li eut un mouvement de
recul puis, voyant que ce gros pachyderme arborait deux magnifiques
cornes et qu'il semblait aussi intrigué qu'elle, elle s'approcha et
le salua :
- Bonjour.
Je m'appelle Li et je suis une licorne. Je suis à la recherche du
livreur de corne. L'aurais-tu vu passer ? Il faut absolument que je
le trouve. - Bonjour, répondit le rhinocéros d'une grosse voix placide. Mon nom est Eugène et je suis un rhinocéros et je ne sais absolument pas de quoi tu parles.
- Tes cornes ? C'est bien un livreur qui te les a apportées ?
- Un livreur ? ajouta Eugène. J'ai n'ai eu besoin d'aucun livreur.
Li
se tut un instant. Elle ne comprenait pas.
- Comment
as-tu fait alors ? demanda-t-elle. - Comment j'ai fait quoi ?
Sensiblement
agacée, Li répondit :
- Tes
cornes ! Comment les as-tu eues ? Qu'est-ce que tu as fait pour
qu'elles poussent ? - Rien.
- Quoi , rien ? demanda Li de plus en plus énervée.
- Rien. Je n'ai rien fait pour les avoir. Elles ont poussé, c'est tout. Un jour, mon museau était tout plat et le lendemain, mes cornes étaient sorties puis elles ont grandi. Je n'ai rien fait de particulier.
- Mais si ! Tu as forcément fait quelque chose ...
- Rien, répondit Eugène.
Trop énervée pour continuer face à ce qu'elle considérait comme un
lourdeau qui ne comprenait pas de quoi elle parlait, Li préféra
continuer son chemin.
- Au
revoir, joli cheval, lui dit Eugène placidement.
Li
se retourna face à une telle insulte :
- Je
ne suis pas un CHEVAL. Je te l'ai dit. Je suis une LICORNE. - Mais non, tu n'es pas une licorne. Tu n'as pas de corne.
- C'est pour ça que je te demandais ... Oh, laisse tomber !
Elle
le planta là, sans un mot de plus.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire